Des sentiments d'incompréhension, de tristesse et de stupéfaction se mêlaient jeudi chez les habitants de Poissy (Yvelines) après le suicide d'un adolescent de la ville, qui avait signalé des faits de harcèlement scolaire.
Au lycée professionnel Adrienne Bolland, où le jeune garçon était scolarisé l'année dernière, ses anciens camarades ont fait part de leur vive émotion.
"Tu étais mon meilleur ami, tu étais comme un frère pour moi. Tu vas nous manquer". C'est le mot que Kevin (prénom modifié), 15 ans, a collé sur la grille d'entrée du lycée, gardé par trois policiers en uniforme.
Kevin et l'adolescent du même âge, qui s'est pendu mardi à son domicile, se connaissaient depuis la primaire. Kevin dit avoir été au courant du harcèlement subi par le jeune garçon, mais il était loin de s'attendre à ce qu'il mette fin à ses jours.
"Je pensais que s'il changeait d'établissement ça allait s'arrêter, mais en fait pas du tout", raconte-t-il, ému, avant de montrer plusieurs textos échangés avec son ami pendant l'été.
Son dernier message, envoyé lundi, est resté sans réponse.
Une cellule psychologique a été mise en place ce matin pour les élèves du lycée.
L'adolescent qui s'est donné la mort était scolarisé depuis la rentrée dans un autre établissement, à Paris.
Jeudi après-midi, Brigitte Macron, le ministre de l'Education Nationale Gabriel Attal et le député des Yvelines Karl Olive (Renaissance) ont reçu la famille du garçon à la mairie de Poissy.
Ils n'ont pas fait de déclaration à la presse à l'issue de cette rencontre d'environ deux heures.
Brigitte Macron, ancienne enseignante, a fait de la lutte contre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement un de ses combats.
Sur le parvis de l'hôtel de ville, les habitants exprimaient leur stupéfaction. "On ne pense pas que ça va arriver dans notre ville, mais ça arrive partout", regrette Albert, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille. "Un enfant de 15 ans, c'est jeune. On ne mérite pas de mourir à cet âge-là", ajoute le septuagénaire, originaire de Poissy.
"C'est un problème de société, il faut que tout le monde s'en préoccupe", renchérit, quelques mètres plus loin, Christiane Haetty, 72 ans.
Selon les déclarations mercredi de M. Attal, le harcèlement de l'adolescent avait été signalé dès décembre 2022, le ministre évoquant des "brimades et des injures répétées".
Des rendez-vous avec sa famille ainsi que les élèves mis en cause et leurs parents ont eu lieu en mars 2023. Le père avait par ailleurs déposé une main courante pour harcèlement en avril au commissariat de Poissy, mais n'avait pas souhaité déposer plainte, a-t-on appris de source policière.
M. Attal a annoncé mercredi l'ouverture d'une enquête administrative sur les faits de harcèlement scolaire et la gestion de l'affaire par les services de l'Education nationale.
Le parquet de Versailles a pour sa part ouvert une enquête pour rechercher les causes de la mort en invitant "à rester à ce stade très prudent".
Pour Arthur (prénom modifié), 16 ans, en première au lycée Adrienne Bolland, la nouvelle du suicide est arrivée comme un choc. "C’est un lycée très soudé, on rigole tous malgré quelques chamailleries", témoigne le garçon, qui fait partie de la cellule anti-harcèlement de l'établissement et a suivi plusieurs formations sur ce sujet.
Jessica Macalou, 18 ans, en terminale professionnelle Accompagnement, soins et services à la personne a elle aussi été touchée par la tragédie même si elle ne connaissait pas le jeune garçon. "Ça aurait pu être évité si ça avait été pris plus sérieusement en compte", lâche-t-elle avant de rentrer dans l'établissement.
La Rédaction (avec AFP)